Un livre d’artistes : c’est l’œuvre qui a été réalisée par des patient·es, et présentée en 2022 au sein de l’espace socioculturel des hôpitaux de Saint-Maurice, dans le Val-de-Marne. Un projet impliquant une autrice et une plasticienne, né grâce au partenariat avec le réseau des médiathèques de Charenton-le-Pont.
D’après les propos recueillis par Marie Cosnuau auprès de Dorothée Langlois, éducatrice spécialisée à l’espace socioculturel des hôpitaux de Saint-Maurice ; Aurore Tartare, monitrice éducatrice ; et Cathy Mayeur, directrice du réseau de lecture publique des médiathèques de Charenton-le-Pont.
C’est en 2019 que tout commence, quand la directrice du réseau de lecture publique de Charenton-le-Pont se rapproche de l’hôpital Saint-Maurice, voisin, et plus précisément de son espace socioculturel. En effet, les bibliothécaires ont la volonté de développer des actions et des fonds à destination des publics empêchés. Or les espaces socioculturels des hôpitaux, passerelles entre les hôpitaux et la ville, portent des projets éducatifs à visée culturelle dont l’objectif principal est de socialiser ou resocialiser les patients.
Après plusieurs rencontres, les bibliothécaires et les éducateurs et éducatrices s’entendent pour travailler autour de la réalisation d’un livre d’artistes. La responsable de la programmation contacte alors l’autrice Natalie Rafal et l’artiste plasticienne Katell Lucas pour animer des ateliers d’écriture et de création plastique. Les frais seront répartis entre la commune de Charenton – qui rémunèrera les intervenantes et bénéficiera dans ce cadre d’une aide du Centre national du livre destinée aux actions en direction des publics empêchés – et l’hôpital, qui prendra en charge les frais annexes (achat de fournitures, goûters d’accueil).
Le rôle fédérateur des ateliers
La réalisation du livre d’artistes se déroule au long de 12 séances. Lors des six premières, Natalie Rafal fait écrire des textes aux participant·es, qui les illustrent et les mettent en forme avec Katell Lucas lors des six séances suivantes.
C’est au sein même de l’espace socio-culturel qu’ont lieu les ateliers. Pour les bibliothécaires, il est en effet important d’aller à la rencontre des publics empêchés là où ils se trouvent. Selon Aurore Tartare, monitrice éducatrice chargée des adultes hospitalisés en psychiatrie, ces actions qui impliquent des intervenants extérieurs sont essentielles pour les patient·es qui ne sortent pas, ou qui ont peu de contact avec l’extérieur. Enfin, l’espace socioculturel étant un lieu ouvert à l’ensemble des personnes soignées et du personnel de l’établissement, il permet d’attirer également des personnes qui ne sont pas inscrites aux ateliers.
La communication auprès des patient·es en amont permet de les impliquer dans le projet. Elle est relayée par le service de communication de la ville, qui fournit les affiches. Les équipes s’efforcent de rendre le lieu d’intervention accueillant : réaménagement de l’espace, proposition d’une ambiance musicale, organisation de goûters, etc. L’ouverture des ateliers aux bibliothécaires et aux éducateurs et éducatrices de l’hôpital renforce également cette convivialité. L’objectif est non seulement de mettre en confiance les participant·es déjà inscrit·es, mais aussi de donner envie aux patient·es qui passeraient là par hasard. Les modalités de participation sont libres : certaines personnes rejoignent les ateliers en cours de route.
Valoriser les pratiques artistiques des participant·es
À la suite des ateliers, le livre a fait l’objet d’une exposition au sein de l’espace socioculturel : une inauguration a réuni l’équipe de la médiathèque, l’équipe de l’espace socioculturel et un grand nombre de patient·es, en présence de l’adjointe au maire à la culture de Charenton-le-Pont et la directrice des hôpitaux. Elle a été l’occasion pour les participant·es de prendre la parole en public et d’exprimer leur ressenti sur le projet. Le livre a été ensuite présenté dans les bibliothèques du réseau de lecture publique, auprès des usagers. La valorisation des ateliers sous forme d’exposition contribue ainsi à l’implication des participant·es : « La réalisation d’un objet pour une exposition dans et en dehors de l’hôpital était très valorisante pour eux », estime Aurore Tartare.
Les médiathèques de Charenton-le-Pont et les équipes des hôpitaux de Saint-Maurice, qui ont « noué des liens forts », souhaitent désormais prolonger ce partenariat par un projet autour des différentes formes de narration vivante, notamment les kamishibai.